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Résumé des interventions suivant l'ordre de passage dans le programme du colloque :
Si la fusion entre l’animal et l’homme est régulièrement mise en lumière, telle la création d’embryons mi-animal mi-homme dorénavant autorisée par la loi de bioéthique du 2 août 2021 ou encore la xénotransplantation – c’est-àdire la greffe d’un organe animal chez l’homme –, la fusion entre l’animal et la machine est quant à elle beaucoup moins médiatisée. Cela s’explique en partie par la nature anthropocentrée de notre droit, fait par l’homme et pour l’homme. Le droit animal n’échappe alors pas à la règle : l’animal a d’abord été appréhendé juridiquement au titre de son utilité pour l’homme. Il a donc été juridiquement réifié, considéré en droit comme une chose au service de l’homme et de ses desiderata. Dès lors, si la fusion de l’homme et de la machine est régulièrement étudiée par les juristes du fait des avancées considérables réalisées par les chercheurs et les entrepreneurs soucieux de figurer parmi les plus compétitifs, la fusion de l’animal et de la machine reste rarement analysée. La robotisation de l’animal peut ainsi être appréhendée au prisme de ses interactions et hybridations avec la machine, des éléments mécaniques étant parfois connectés au corps de l’animal ou intégrés dans le corps de celui-ci, transformant ainsi l’animal en robot vivant. Mais il arrive également que le robot remplace l’animal par l’utilisation d’un robot-animal. Ce phénomène de robotisation de l’animal, aussi large que diffus, est en plein essor. Reste à savoir où placer le curseur pour que la technologie soit toujours au service de l’animal, évitant ainsi les nombreuses dérives liées à sa robotisation croissante.
Parler des liens entre l’homme, l’animal et le robot à un vétérinaire le conduira immanquablement à penser « prothèse », cet objet façonné pour suppléer un organe ou une fonction défaillante. D’abord destinée à l’homme, ce dernier en fait profiter de plus en plus fréquemment l’animal, souvent pour son plus grand bien. Mais certaines dérives concernant les prothèses « esthétiques » interrogent quant à la finalité poursuivie : ne cherche-t-il pas dans ce cas à « améliorer » l’animal, comme il le ferait d'une chose ? De plus, l’homme sait également utiliser l’animal comme une « prothèse vivante », notamment les chiens d’assistance, posant cette fois la question de leur bien-être dans ce travail, et de leur devenir lors de leur retraite. Dans les deux cas, le flou juridique qui entoure l’animal, à la fois réifié et être vivant doué de sensibilité, mérite d’être éclairci, pour éviter toute dérive qui ne serait nocive qu’à lui seul.
Encore peu connu, le métier de prothésiste animalier permet d’élargir la palette de solutions disponibles pour les vétérinaires et autres professionnels de la santé animale. Si le prothésiste animalier peut s’appuyer sur ses connaissances et l’expérience séculaire (voire millénaire) de l’appareillage humain, il est également confronté à de nouvelles difficultés avec, la plupart du temps, des appareillages inédits. Mais là où l’on pourrait penser que le défi est principalement technique, il est en réalité beaucoup plus large et diffus car, contrairement à la prise en charge de rééducation d’un patient humain, la rééducation d’un patient d’une autre espèce animale reste à construire.
Les robots humanoïdes se distinguent des IA par leur incarnation, en habitant un corps physiquement présent dans le monde et donc intelligible pour des êtres humains également présents corporellement dans le monde. Notre présentation mettra l'accent sur l'importance de ce corps, sur les contraintes techniques qui s'imposent à lui, mais aussi sur la façon dont les normes sociales du monde dans lequel le robot est amené à agir et interagir vont définir une forme particulière au robot, mettant en relief une certaine idée de ce que devrait être un corps humain. Si l'anthropomorphisme semble essentiel à la reconnaissance du robot, notamment de ses intentions, le robot reste radicalement différent de l'humain, rendant ainsi inaccessible son fonctionnement interne. En cela, il peut nous permettre de penser d'autres modes d'existence que le seul mode humain. Ainsi, le robot entraîne avec lui des questionnements toujours renouvelés.
Pour penser le rapport de l’homme et de l’animal comme du robot, il faudrait peut-être renoncer à les penser chacun dans leur spécificité, abandonner toute forme de recherche essentialiste pour partir à la recherche d’une définition de type relationnel. Ne plus se demander, comme le faisaient Descartes et Malebranche si les animaux sont des machines, un assemblage de pièces, ou bien encore si les machines sont vivantes ? Mais plutôt de poser la question en termes de rapports que les humains entretiennent/pourraient entretenir autant avec des formes vivantes que non-humaines avec qui les humains n’en formeraient pas moins une communauté. À cet égard, une célèbre saga de science-fiction permettrait sans doute de rebattre les cartes : Star Wars, réalisé par Georges Lucas.
Longtemps ignorées, la zoophilie et la zoopornographie font l'objet d'une prise en compte juridique avec l'objectif de lutter contre les atteintes sexuelles aux animaux victimes. Cette prévision juridique a néanmoins été longue et demeure imparfaite. Les critiques doivent alors distinguer l'organisation de la répression pénales des actes zoophiles physiques et virtuels. De ces constats devront naître les améliorations juridiques à porter.
La science-fiction s’est emparée du sujet, relatant les interactions du futur entre les humains et les robots humanoïdes. Dès sa première saison diffusée en Suède en 2012 et en France à partir de 2013, la série Real Humans, 100% humain a mis en scène divers liens affectifs et sexuels entre les robots et les humains, annonçant la possibilité de relations entre des humains et des robots humanoïdes appelés « hubots », doués d’intelligence et de sentiments. Les robots sexuels ne relèvent cependant plus de l’imagination. Harmony, premier robot sexuel à l’apparence féminine et doté d’intelligence artificielle (IA) a en effet été mis sur le marché courant 2017 tandis que son homologue à l’apparence masculine, prénommé Henry, était quant à lui disponible un an plus tard. David Levy, spécialiste de l’intelligence artificielle, a déclaré lors de la 2e édition du congrès Love and Sex with the Robots à Londres en décembre 2016 : « Avoir des relations sexuelles avec des machines c’est pour demain, avec l’arrivée des premiers robots sexuels. […] Dès 2050, il sera possible de se marier avec eux. Ils auront la capacité de tomber amoureux d’un humain, de se rendre romantiques, attrayants et sexuellement désirables ». Ces nouvelles relations interrogent d’un point de vue éthique et juridique. Dans une démarche prospective, il convient alors d’envisager les possibles mutations du couple, entraînées par l’avènement du robot sexuel, mais également les conséquences de l’utilisation d’un robot sexuel et notamment l’encouragement potentiel de violences, dans un contexte de réification du corps féminin.
La robotisation modifie fondamentalement nos rapports au travail. Nouvel objet insaisissable, aux capacités infinies, le robot prend place au sein des organisations publiques et privées. Perçu parfois comme un allié, parfois comme un ennemi pour le travailleur, le robot impose de modifier le cadre existant en droit du travail. C’est en réformant notre système juridique actuel qu’il sera envisageable de créer un monde du travail protecteur, dans lequel il sera possible de relier l’Homme et le Robot pour répondre aux enjeux de performance des organisations.
Quelles sont les raisons pour lesquelles le droit, soit l’Homme, pourrait attribuer une personnalité juridique à l’Animal ou au Robot ? Notre capacité à personnifier les animaux, mais encore notre faculté à donner une forme anthropomorphique à des robots dotés d’une intelligence artificielle (IA) justifieraient-elles cela ? Si l’animal se distingue du robot par son appartenance au vivant et par sa sensibilité lui conférant le droit d’être protégé, le robot, quant à lui, n’est qu’une chose sans ressenti ni souffrance qui ne devrait pas faire l’objet d’états d’âme. Pourtant, les progrès en matière de systèmes d’IA suscitent des interrogations quant à l’octroi de son éventuelle personnalité juridique. Sa forme anthropomorphique, son intelligence artificielle et, à présent, son registre langagier à la première personne du singulier – adoptant un comportement semblable à celui d’un agent pensant – sont autant d’éléments alimentant les fantasmes en faveur d’une reconnaissance juridique.
Les Droits de l'Homme et l'Humanisme, s'ils ont été indispensables pour les humains ont été peu efficaces jusqu'à présent en matière de respect des animaux et de protection de la faune et de la flore. Cette conférence fera un rapide tour d'horizon de quelques grandes Déclarations des Droits de l'Homme et des Animaux et présentera la Déclaration des Droits de l'Être Sentient et plus particulièrement son article 10 sur l'Humanimalisme, qui prône un respect des humains et des animaux.
Les robots, créés par l’homme, sont des êtres performants, mais cantonnés dans le domaine purement cognitif. Il leur manque essentiellement le caractère « sentient » qui caractérise les animaux au système nerveux le plus développé, avec ses corrélats émotionnels, empathiques et altruistes. Il faudrait que l’évolution à venir de l’humanité ne s’oriente pas vers une logique productiviste aveugle, proche de celle des robots. Le recours à l’émotion animale, que l’homme porte en lui, permettrait d’éviter cette évolution. L’homme pourrait ainsi espérer équilibrer ses besoins cognitifs et émotionnels, pour accéder à une vie plus harmonieuse, et probablement plus paisible. C’est donc par un recours à son animalité oubliée que l’être humain peut espérer échapper à la robotisation rampante de sa société.
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